Naissance d’Hélène
Ma chère Minette a aujourd’hui 2 mois. Elle est bien gentille, si grosse, si grasse, mais elle crie beaucoup.
Manifestation du complexe d’Œdipe de Bellotte qui a 5 ans: René dit que Raoul le fera mourir de chagrin, ce qui effraie beaucoup Bellotte qui pleure et qui me dit: « Ah !Que deviendrai-je si papa vient à mourir. Je n’aurai plus personne pour me coucher. Je m’assierai là sur un fauteuil et j’attendrai ». Et elle sanglotte en disant cela.
Le Dr Rancurel vient vacciner le bébé.
Bellotte a peur que le diable ne l’emporte et dans son lit le soir elle appelait son père pour qu’il l’asperge d’eau bénite afin que le diable ne vienne pas la chercher !!!
Nous faisons goûter nos chéris dans une vacherie de la rue du bac et Bellotte aime beaucoup sa tasse de lait chaud et son croissant. (elle a 6 ans)
Bellotte veut quitter sa mère pour devenir servante chez Mme Pinondel mère !
Bellotte n’ira pas à l’école des Sœurs parce qu’elle est trop loin des Confins.
Elle graisse les cheveux de Bellotte pour les empêcher de tomber (avec de l’huile de ricin).
Hélène se plaint de Bellotte « apathique, dédaigneuse et indifférente… » (elle a 17 ans).
Ils sont à Villefranche dans un appartement de l’ancienne gendarmerie.
Bertrand est présent, ainsi que Bellotte qui apprend à danser le Boston. Néné est resté à Paris ou plus exactement au collège à Evreux.
Bellotte a aujourd’hui ses 22 ans. Que Dieu la bénisse !
Dans l’hiver 1914 et au printemps Bellotte tousse beaucoup.
Dans la nuit : Bellotte et moi, vers 5 h du matin des bruits extraordinaires.
C’était comme des crépitements sur la table, sur le chemin ou sur le balcon… J’ai pensé que cela Pouvait être l’âme de mon bon René qui se réclamait à nous. J’ai prié tout bas et Bellotte en son particulier à son père : « Papa, si c’est toi, refais-nous encore ce petit bruit-là. Si tu as besoin de prières nous en dirons, mais fais-nous savoir si ce bruit vient de toi, et elle croit avoir encore entendu ce crépitement 3 fois mais chaque coup très éloigné l’un de l’autre.
J’ai passé la fin de ma nuit à prier pour lui.
Départ à Villemomble pour les vacances de Pâques avec Néné et Bellotte.
Hélène reparle de ses petits agendas de 1906 et 1907, l’année terrible de sa maladie.
Bellotte me tourmente beaucoup car depuis notre retour à Paris elle ne cesse de tousser, elle a mauvaise mine et mange à peine.
Bellotte manifeste son désir d’indépendance.
Le Père Delfortrie m’a blessée sans le vouloir. Il me demande ce que je vais faire de Bellotte, si je ne vais pas songer à lui faire tirer partie de son talent en piano, elle s’est assez dévouée à ses parents et il est temps qu’elle songe à elle.
Les nouvelles politiques sont excessivement graves. Il paraît que la guerre est déclarée entre l’Autriche et la Serbie. Ce sera bientôt un conflit général. La France, amie et alliée de la Russie se prépare à entrer en guerre pour soutenir et aider la Russie. Mais en attendant la panique est en France. Tous les bureaux de caisse d’épargne sont assiégés par la foule des gens qui viennent chercher leur argent. Néné dit qu’il s’engagera…Bellotte dit qu’elle va me conduire dans le Nord pour avoir sa liberté et s’en aller avec la Croix Rouge soigner les blessés.
Madeleine de Champeaux (fille de Guillaume) fait une scène a Bellotte à cause de ses cours de médecin qu’elle prend pour secourir les blessés. Elle dit que ce n’est pas convenable pour une jeune fille.
Voyage pour Quimper dans un compartiment bourré de militaires. Nous n’avons pas pu dormir.
Bellotte va à la Poste pour téléphoner à son amie Marguerite… Cette invention du téléphone est merveilleuse. Après quelques minutes d’attente Bellotte est mise en communication avec son amie qui est à Paris.
Le Père de Witasse propose à Bellotte de s’occuper, à Paris, de 2 garçons de 9 et 6 ans les après-midi de 2 h à 7 h du soir pour les promener, s’en occuper, leur expliquer leurs devoirs…Je n’ai pas pu m’empêcher de lui montrer mon chagrin. Ainsi , elle me sacrifierait complètement. Je ne pourrais plus ni sortir avec elle, ni plus faire de visites… mieux vaut m’enterrer tout de suite. Le Père de Witasse n’a guère de jugement… Heureusement Bellotte a compris… que cela ne me plaisait pas… J’ai écrit au Père de Witasse ce que je pensais !
Bellotte m’en veut que je ne veux pas qu’elle donne des leçons tous les après-midi. Elle trouve ma société déprimante parce que je n’aime plus la vie et que je pleure toujours mon petit Néné.
Le médecin dit qu’Hélène a de l’hypertension artérielle causée par le mauvais temps.
Jacques Donnat, qui travaille au bureau de la Légion d’Honneur propose une place à Bellotte. Sa mère ne veut pas.
Bellotte va à la mairie chercher la carte de pain pour deux mois.
Bellotte a une glande au cou qui la fait souffrir. Elle est toute fiévreuse. Sa santé me tourmente.
Nous allons dour la première fois chez le Dr Allard pour les rayons X de Bellotte… Il lui découvre des ganglions dans son poumon gauche qui respire mal. On lui fait la photographie de son intérieur.
2e séance de rayonx X
3e séance de rayonx X.
On met des ventouses et des cataplasmes à Bellotte. Elle a touiours de la fièvre : 39 °
Un médecin appelé parle pour la première fois de tuberculose et ordonne de la suralimentation.
Bellotte souffre d’une violente douleur au côté.
Le Dr craint une pleurésie.
On lui fait prendre 2 pilules d’opium pour dormir. Cela l’a calmée.
Ponction d’eau au poumon droit.
L’autre poumon commence à se prendre.
Plusieurs médecins la visitent.
Phlébite au bras gauche.
Le Dr dit qu’elle n’est pas du tout sauvée… Qu’elle doit devenir tuberculeuse. C’est une suite inévitable de la pleurésie.
Mi-juin, il y a un mieux, Bellotte remange un peu.
Départ de Bellotte en voiture-ambulance pour le sanatorium de châtillon.
Désinfection de la chambre avec du formol. La santé de Bellotte s’améliore un peu. Puis redevient mauvaise en Août.
Du 20 Août au 3 Septembre 1919, Hélène va faire un séjour à Tourcoing chez sa sœur Maria. Bertrand est venu avec elle.
En Septembre, nouveau traitement pour Bellotte. Les rayons chauds doivent faire passer ses glandes. Elle se sent épuisée. Sa mère vient vivre auprès d’elle à Châtillon pendant 15 jours.
Je me méfie du caractère de Raoul, très bon garçon, mais si mai équilibré ! Raoul nous donnerait tout ce qu’il a, mais ne sacrifiera jamais ses goûts à sa sœur. Il aime la discussion et ne comprend pas que la discussion pourrait la tuer dans l’état de faiblesse où elle est actuellement.
Il y a un peu lutte entre les deux médecins : Artault qui dirige la maison de Châtillon et Piquet médecin de Paris. Le sanatorium n’est pas chauffé en octobre. Bellotte perd ses forces de jour en jour.
Bellotte dit qu’elle envisage la mort avec sérénité. Elle me dit qu’elle n’en a pas peur, mais que cela l’ennuie à cause de la perturbation que cela amènera dans notre vie…
Le Dr Artault est plein de suffisance et dit qu’elle n’est pas en danger.
Nous quittons Châtillon avec la voiture de Mme Boucard pour la rue Mayet. Bellotte est bien faible.
L’oncle Guillaume donne 1000 frs pour bien soigner Bellotte. Les nuits sont de plus en plus pénibles. Le Père Havret vient régulièrement apporter la Communion.
Hélas, me voilà arrivée au bout de mon calvaire et j’ai dû boire mon calice jusqu’à la lie car rien n’a pu arrêter l’inexorable mort !
C’est affreux… hier soir ma pauvre chérie ne me paraissait pas aller plus mal que la veille, sauf qu’elle urinait de moins en moins, mais la température baissait, et dans ma folie je m’imaginais que c’était un bon signe tandis qu’au contraire c’était très mauvais….
FÊTE DE L’IMMACULÉE CONCEPTION
C’est à 1h1/2 du matin que je lui ai donné mon dernier baiser en la mettant bien relevée sur ses oreillers. Elle avait la respiration embarrassée…J’étais très fatiguée… Je me suis endormie et je ne me suis réveillée qu’en entendant sonner 6 heures. Ah ! Quel épouvantable réveil ! Le feu était éteint. Elle semblait dormir. Après avoir touché le petit poële, je vais à son lit d’où je n’entends rien. Je la vois bien paisible dans la même position où je l’avais laissée à une heure et demie. Je lui prends le bras. Il était froid. Je le palpe jusqu’au coude : « Oh ! Ma chérie, tu as froid ! Souffres-tu ? Dis-moi ce que tu as ? »
Hélas, plus de réponse … Elle est morte.
Je bondis hors de la chambre en appelant mes deux fils : « Mes enfants, venez vite, votre petite sœur est morte…Elle est morte. » Ah ! Quel réveil pour tous les deux.
9 h : Enterrement à St François Xavier.
(Elle repose au cimetière de Vaugirard aux côtés de son père)
Ma pauvre chérie est morte de la tuberculose… Il faut désinfecter tout ce qu’elle a touché.
Hélène, écrit le 1″ Janvier 1920 :
« J’hésite à commencer ce petit journal. À quoi bon maintenant que je n’ai plus ma Bellotte chérie. Que puis-je espérer de bon dans ma triste vie… Dieu me l’a prise après huit mois de grandes souffrances… Raoul est bien frêle, délicat…
La désinfection nous rapporte les matelas et tous les vêtements de ma pauvre. Bertrand est retourné à la Légion d’Honneur.