EXHUMATION. Bertrand y assiste : « Il a revu les restes glorieux de son frère chéri, a vu ses blessures, une jambe cassée en deux endroits, son corps était à moitié couvert de son linge et de sa capote en lambeaux, ses bras croisés. À l’un de ses poignets il a repris sa médaille d’identité où l’on pouvait encore lire son nom « de CHAMPEAUX René, sergent au 169e». Bertrand a retrouvé sa plaque à lui qu’il avait donné […]
Nuit à Dugny. Après-midi au cimetière auprès de la tombe chérie. J’y ai dit mon Rosaire. Bertrand y a fait une aquarelle. Visite à Mme Bodeau, la châteleine du Prieuré où notre Néné est mort. Cette dame est bien aimable et surtout très pieuse.
Je me suis remise à écrire la vie de Néné. J’écris ses lettres du collège quand il avait 12 ans et je les trouve toutes si bien tournées, si intéressantes que cela me poigne le cœur et me fait pleurer toutes mes larmes.
Bellotte m’en veut que je ne veux pas qu’elle donne des leçons tous les après-midi. Elle trouve ma société déprimante parce que je n’aime plus la vie et que je pleure toujours mon petit Néné.
En revenant de la messe de Villemomble nous rencontrons Mr et Mme Temporal qui ignoraient la mort de Néné.
Nous allons à la messe à Villemomble. Nous allons dire bonjour à Mr le curé. Le nom de Néné chéri a été écrit en lettres d’or sur des plaques de marbre dans l’église. Il n’est donc pas oublié dans ce petit pays où il est né..
Le Père Benier, aumônier militaire, vient nous voir et nous dit que Néné n’a pas eu les yeux crevés. Le sang sur les joues venait d’égratignures. Il fait – 9°C et il neige .
Il y a 6 mois que mon bien-aimé petit Néné est mort ! Son ami le sous-lieutenant Babault vient nous voir et nous dit que Néné a eu les jambes brisées et le ventre ouvert par un éclat d’obus. Il a eu ses vêtements déchirés, ses lunettes brisées dans ses yeux. Il a du avoir un œil crevé. Son camarade a vu couler son sang le long de sa joue.
(Elle reproche à son défunt mari de ne pas avoir protégé son fils ) Nous allons au cimetière dire à notre cher René que nous l’aimons toujours quoique il n’ait pas pu protéger notre petit chéri.