Nous allons après le repas nous asseoir au potager pour voir passer les trains. Tran a aujourd’hui 32 ans ! Ah ! Que Dieu me le rende ! Je pense bien à lui.
Bertrand nous dit qu’au milieu des combats il tremble à claquer des dents.
Mon cher permissionnaire est bien content de la bonne nuit qu’il a passé dans son lit, la première déshabillé et couché sur un matelas depuis 3 mois.
Bertrand nous arrive vers 10 h aux Confins, bien maigri. Il vient pour 8 jours. Il est déprimé et fatigué par cette vie de guerre. Ce qu’il nous raconte me glace de terreur pour l’avenir.
6h du matin Bertrand arrive aussi en permission ! Mais Raoul doit partir à 9h. Tran est intarissable de détails sur sa triste vie à la tranchée et sur les dangers courus.
La grande offensive a été un grand désastre pour nous. Le général Mangin qui en était l’instigateur a été cassé et envoyé à l’arrière car ce n’était qu’un incapable… Il a fait marcher ses hommes sans les encadrer par l’artillerie, et tous ont été tués ou blessés.
Lettre de Bertrand qui raconte toutes les souffrances qu’il a endurées dans les tranchées de Champagne : Enlisement dans la boue, enlisement dans sa sape un obus étant tombé sur les marches… Ils ont été enterrés vivants pendant une nuit et un jour mais ont réussi à dégager l’entrée. Ils ont dû se préserver des gaz asphyxiants envoyés par des obus. Bertrand a eu des camarades qui sont devenus fous. Il a souffert de la faim, de la soif […]
Raoul est dans l’Aisne. Il a été au front près de Reims. Il conduit des tracteurs conduisant des canons de marine. Il fait moins froid, mais Bellotte a la grippe !