Cette horrible guerre qui n’en finit pas me désole… Je pense a mes pauvres garçons… à Raoul malade à Mondros… J’espère que Bertrand court moins de risques que les autres étant brancardier et infirmier en ce moment. Mais où est mon petit Néné ? Il m’a écrit le 29 Décembre qu’il est tous près d’aller dans les tranchées. Pour l’instant il apprend à monter à cheval.
Néné entre ce matin pour la première fois à la chancellerie de la Légion d’Honneur. Il va y gagner 150 frs par mois.
Néné veut que je signe une autorisation pour qu’il s’engage. Je n’y suis pas du tout disposée.
Le courrier de ce matin m’apporte une pénible nouvelle ; Mon pauvre petit Néné est parti au front hier matin. Il s’en va en Argonne du côté du Four-de-Paris… J’ai beaucoup pleuré toute la journée…
Néné arrive. Il a échoué à son examen et n’est que sergent . Il vient pour 8 jours à Villemomble.
Avec Raoul et Néné qui est venu passer le dimanche avec nous, nous allons au cinéma…. On y voit des bateaux de guerre aux Dardannelles, agités par la tempête en pleine mer, et c’était curieux d’entendre les observations saugrenues de nos voisins qui certainement n’en avaient jamais vu en réalité et qui disaient : « Pourquoi les fait-on bouger comme cela ? »
Nous allons à la messe de 8h avec Raoul. Au retour nous avons une grande joie. Nous voyons un gentil et très jeune militaire qui s’avance vers nous et nous reconnaissons Néné. Ah ! Comme il a bonne mine, comme il est joli, frais et rose dans son uniforme bleu horizon !
Finalement Néné est convoqué tout de suite Boulevard Brune dans un bureau militaire et là on lui a dit qu’il était reçu à son examen d’élève officier et qu’il devait partir aujourd’hui pour se faire équiper à Montargis… Pourquoi ne le laisse-t-on pas passer sa tête de Pâques en famille ! J’en suis malade de chagrin !