1882

Naissance de Raoul à 9h30

1884

Signature de l’acte d’achat chez le notaire de Noisy

« Les Confins, c’est ainsi que René désire appeler notre chère maison »

« Bénédiction de la maison et réception de M. le curé à dîner »

Plantation d’arbres aux Confins

1885

Enterrement de Victor Hugo.

Kop (Raoul) est malade. Sa mère le soigne avec du tabac qu’elle lui fait priser.

Le puit des Confins à 11m50 de profondeur.

Naissance de Bertrand

Kop (Raoul) qui est aux Confins dit en apprenant qu’il a un petit frère ; « eh bien, il faut le jeter à la mare !« 

1886

« Mon Kop est un vrai lutin bien malin, bien espiègle. Hier, il tombait sur ses mains après avoir fait mille folies, et Emilie lui dit : – Tu vois, c’est le Bon Dieu qui te punit !.. Il se relève, regarde ses mains et répond : – Alors, c’est le Bon Dieu qui a sali mes mains ! Puis il ajoute, – Allons, Raoul de Champeaux, ne dites pas de bêtises.« 

Bertrand a aujourd’hui 5 mois, il pèse 12 livres.

 

Il est question de démolir la maison des Confins :

« les planchers sont pourris »

M. Jabally fait les plans de la maison

Achat d’un terrain de 558 mètres à 2,25 le mètre. « Nous allons bâtir là une petite maison que nous appellerons « la Prairie ».

1887

Le colonel Donnat est mort ce matin.

Nous allons à Melun porter nos condoléances à Marie. Elle reste veuve dans une position bien précaire. La pension de veuve de colonel n’est que de 2000 francs par an, et elle n’a que 1200 frs de revenus. On espère que l’Etat qui s’est servi de son mari pendant 40 ans fera quelque chose pour elle.

Nous avons l’appartement de la rue Bonaparte, n°80. René a signé le bail hier. Déménagement le 18 mars. Il neige.

On entend crier dans les rues la mort de l’empereur Guillaume d’Allemagne.

J’ai acheté ce matin un joli petit manteau bleu marine pour Tran (Bertrand). Il a une petite tournure comme une petit femme. Ce manteau lui va a ravir.

Kop a des réparties très drôles pour son âge (6ans et demi). Ce matin pendant le déjeuner il disait : « – Je vais bien manger pour devenir grand. Car quand je serai grand, papa sera vieux. – Et quand ton papa sera vieux, qu’est ce que tu feras pour lui ? – Quand papa sera vieux, eh bien ! Je l’enterrerai ! »

Mort de l’oncle de René, Wattelier.

Nous allons nous promener au pont des Coquetiers, promenade favorite de Kop. Là, nous trouvons un grand troupeau de moutons. il y avait de si jolis agneaux que j’en aurai volontiers acheté un, mais nous rentrons à Paris. Il n’y faut pas y songer.

Il a tant plu qu’il y a 25 cm d’eau dans la cave des Confins.

Mes deux chéris ont pris chacun leur premier bain de l’année. Tran a eu peur et ne voulait pas s’asseoir dans sa baignoire, mais je pense qu’au second bain il sera plus hardi.

Kop ne veut pas faire sa prière, sa mère le gronde et le fouette.

Je reçois ce soir M. le Curé. Et Fortuné Wattelier. M. le Curé est bien gai.

Kop a 5 ans.  « Je suis grand, j’ai déjà 5 ans ! Et quand j’aurai 6 ans, Maman, est-ce que je serai plus grand ? ». Il est tout content à l’idée d’aller à l’école l’hiver et d’apprendre à lire.

Kop est très curieux en questions de géographie. Hier, je lui disais que la terre était ronde et qu’elle tournait. Aussi, tout à l’heure, il me dit d’un air réfléchi : « tu sais, maman, j’ai beau la regarder, je ne la vois pas tourner. »

103 pots de confiture cette année.

Kop a été privé de dessert parce qu’il a été trop gourmand pendant le repas… Cette après-midi il m’a répondu « Zut ! »  parce que je lui défendais d’aller à la cuisine. je l’ai mis à genoux dans un coin et il a dit 20 fois « je ne dirai plus de vilaines choses à Maman ! ».

J’ai été conduire Blanchette (la chèvre) dans la prairie.

René m’inquiète par son découragement. Ses affaires ne vont pas, sa santé est mauvaise, il tousse toujours et il est miné par l’insuccès.

Nous avons été conduire à l’école pour la première fois notre chéri Kop. Le pauvre chéri a été bien gentil mais en me voyant partir son pauvre coeur s’est gonflé et il a poussé un sanglot en se jettant à mon cou. Le lendemain, Kop rapporte de l’école deux bons points : un de sagesse, l’autre de lecture.

Projet de mariage pour Fortuné Wattelier. La jeune fille n’a qu’un défaut, elle a 1m80 de hauteur, et seulement 80 000frs de dot. il faudrait 100 000 frs.

Vente de Blanchette qui devient dangereuse avec ses cornes.

Séjour à Arromanche : Paris-Caen en train toute la nuit, puis voiture jusqu’à Bayeux et Arromanche à 9h (chez Marie et Eugène Donnat).

1888

Déménagement vers la Prairie pour reconstruire les Confins

Démolition de la toiture des Confins et une partie du 1er étage.  » La maison n’est composée que de plâtre et de bois ».

Marie Donnat veut que ses fils soient militaires. « Pauvre Marie, elle est pleine d’orgueil et de vanité, elle a honte de l’état de René. Pour elle c’est un déshonneur d’avoir un homme d’affaire dans la famille. »

Nous allons dans les bois autour du pont des Coquetiers et là, en passant devant une mare, pour nous amuser nous faisons mine d’y jeter Tran. M. le Curé est venu dîner (1h de retard). Menu : bouillon au tapioca, vol au vent, gigot et haricots, poulet salade, gâteau St Honoré, dessert variés, raisin

« La maison avance beaucoup. Les parquets du deuxième étage sont posés. Nous allons avoir une maison bien confortable. »

1890

Raoul prend des leçons de violon et de piano. Il fait des progrès surprenant en violon.
Le prix des leçons est de 20frs par mois.

Hélène se lamente de la profession de son mari. « Je souhaite bien que mes fils ne suivent pas l’exemple de leur père. Si l’un pouvait être ingénieur, ou médecin, ou notaire, curé de campagne, voilà toute mon ambition pour eux. »

Je fais dire aux garçons leur prière matin et soir, et je leur parle…du Bon Dieu.

Récit d’une dispute conjugale…

 

La dispute

L’institutrice apprend à Hélène à fumer une demie-cigarette.

Hélène dit qu’elle est enceinte. Elle a déjà fait deux fausses couches.

On met Raoul au Petit Séminaire à Paris, mais il n’y reste que 2 jours. Le 7 novembre, il entre à l’école St Guillaume, tenue par les frères de la rue de Grenelle.

« Achat pour les Confins de 22 chaises dont 6 en fer pour le jardin. »

1891

Raoul, qui a 8 ans, joue du violon devant les Charles Bertinot. Ils sont émerveillés, il joue si bien !

Il a fait si froid tous ces jours derniers que la Seine est entièrement gelée.

Première leçon de violon pour Kop par Mr Parvy. Il joue l’Ave Maria de Gounod.

« Jeune fille, j’ai plus souvent pleuré que ri. Et, jeune femme, j’ai souffert de toutes les manières, non par mon René, mais par une foule de circonstances, de tristesses qui ont empoisonné ma vie !
Manque de réussite dans les affaires de mon mari ; gêne par conséquent dans mon ménage; embarras domestiques, manque de santé général. Mes enfants sont bien délicats, réussirai-je à les élever ? Mon mari est délicat… »

(Elle n’inquiète de la naissance future) « Mon Dieu ayez pitié de moi. Faites-moi bien passer cette terrible épreuve ! Rendez-moi la santé… Pourvu que cette petite ne coûte pas la vie de sa mère. »

Samedi 23 Mai: Naissance probable de la petite Hélène ou du petit Jacques ! Mon Dieu protégez la mère et l’enfant
(Son mari continue la page en disant que la naissance n’a pas eu lieu )

(Hélène reprend l’écriture le Dimanche 24 et le 25, puis rien. Reprise par René le Jeudi 28 Mai)
Ma pauvre femme a dès le matin les signes avant coureurs… Je cours chercher le Docteur…

Naissance à 9h30 (du soir) après de cruels moments adoucis seulement par le chloroforme. Dieu nous envoie une belle petite fille . Hosannah !

Naissance d’Hélène

La jolie petite fille va bien et ne demande qu’à vivre. Les garçons sont chez Jeanne Wattelier.
( Les pages du 30 Mai au 12 Juillet sont vides. Hélène reprend l’écriture le 13 Juillet)

Je mets pour la première fois à mon bébé chéri des chaussons et des bas avec un linge en guise de culotte. Elle est gentille à croquer ainsi et gigotte tout à son aise. Cette après-midi elle dort un peu dans le bois. (Ils sont donc aux confins)

Ma chère Minette a aujourd’hui 2 mois. Elle est bien gentille, si grosse, si grasse, mais elle crie beaucoup.

Kop (9 ans) a complètement déchiré son tablier rouge. Aussi je le gronde fort et je lui fais écrire le verbe déchirer ses vêtements. Son professeur vient à son tour et lui donne le verbe rire pendant la classe. Il n’a pas été sage le pauvre gamin . C’est une fameuse journée pour lui !

J’ai fait prendre à Minette son premier bain dans la baignoire.

Tran est bien gentil, il fait déjà des conquêtes. (il a presque 6 ans) Il y a des dames qui passent sur le chemin (qui deviendra l’allée Gambetta) qui lui font mille amitiés. Elles l’embrassent à travers la grille et l’appellent leur chéri. En effet, c’est un charmant enfant doux et sage et si intelligent !

Je suis vraiment une heureuse mère›. Mes trois enfants sont ravissants. Kop est charmant avec les cheveux bouclés, ses yeux malins. Tran est à croquer tant il est svelte et malicieux, et Minette est un ange !

Kop a aujourd’hui 9 ans ! Quel grand garçon ! Il est bien gentil. C’est dommage qu’il soit si paresseux…Sa paresse va nous mettre dans la nécessité de le mettre en pension l’année prochaine.

15 Déc. 1891 (Elle crie misère )

René doit sortir dès le matin pour chercher de l’argent. J’en dois 20 frs au boucher, 20 francs à Jeanne, et il n’y en a plus dans la maison ! Tran tousse et je ne fais pas venir le médecin parce qu’il commanderait des médicaments et nous n’avons pas d’argent pour les payer. Je n’ai plus ni savon, ni eau de Cologne pour la toilette de Minette. Mes souliers sont percés, il n’y a plus de charbon de terre, ni pommes de terre dans la maison… Quelle misère noire ! Si René retombait malade je devrais aller au Mont de piété ! Et personne ne se doute de notre détresse. Nous voici à l’époque des étrennes où il faut tant dépenser d’argent.

(À Tran qui souffre de l’estomac, sa mère lui donne un peu d’eau de vie. Il a 6 ans)

Minette dit « Maman, Papa »

1894

« Tran est l’obéissance même ».

Nous achetons 2 belles cheminées pour le salon et la salle à manger.

Il gèle et nous allumons le calorifère.

En Février il est question de mettre Raoul et Bertrand en pension à Nîmes pour 1200 frs les 2.

Raoul est en pension à Juilly. Le surveillant du collège, Mr l’Abbé Marie, fouette Raoul à nu.

Tran fait sa deuxième confession….Si le Bon Dieu le protège toujours, je suis persuadée que plus tard cet enfant sera prêtre, jamais il n’oublie ses prières, il pense continuellement au Bon Dieu.

René conduit les enfants à l’abbaye de Livry. Il désirait parler aux Pères de Nîmes, mais hélas… les Pères qu’il connaissait n’étaient pas là.

Mort hier de la petite Louise Wattelier (enfant de Jeanne et Fortuné, 2 ans). Elle est morte en 4 jours du choléra.

René va me commander un bain qui nous arrive à 5 heures : enfin j’aurai pu en prendre au moins un. !

Description du caractère de Raoul : « Raoul est un moulin à paroles, un inventeur fini et un mouvement perpétuel. Aujourd’hui il imagine d’atteler les biquots à sa voiture de pouspous ».

Première Communion de Raoul à Juilly et fête aux Confins le lundi 11 avec la famille.

Assassinat de CARNOT à Lyon.

Pour les grandes manœuvres deux soldats viennent coucher aux Confins, on tue 2 lapins pour le dîner.

Le médecin ordonne à Tran de l’hydrothérapie : il s’agit tous les jours de le mettre dans une chemise trempée dans de l’eau froide, une autre par-dessus, l’envelopper dans une couverture de laine et le coucher bien chaudement durant une heure pour qu’il ait une réaction, une transpiration. Cela doit le fortifier.

1896

Naissance de René

Le Dr Rancurel permet à l’accouchée de s’asseoir dans le fauteuil.

Nous décidons de faire deux placards dans la salle à manger.

Vers composés par René, son mari, pour sa fête, lus par Tran :

L’allégresse avant-hier habitait dans nos cœurs
De notre mère à tous nous chantions les grandeurs.
De la Vierge Marie nous chantions les cantiques
Que doit-ce être aujourd’hui, oh mère si aimée
Que c’est la fête à toi, la fête désirée.
Oui, nous t’aimons autant sous ses humbles portiques
Que dans tous ces palais les plus riches enfants
Qui offrent à leurs parents les plus précieux présents.
Aujourd’hui aux Confins ni pétards ni fusées
Mais pour toi, Mère aimée, prières enflammées.
Nous demandons à Dieu qu’il te donne santé,
Force et courage : que le petit Néné Cet innocent chéri qui par nos vœux te parle Pas trop ne te fatigue et pas trop ne se plaigne.
Et par notre travail nous chercherons aussi
A contenter ton cœur, c’est notre grand souci !
Vive notre maman ! Que le Bon Dieu lui donne Tout ici et là-haut ! Certes, elle est si bonne !

Manifestation du complexe d’Œdipe de Bellotte qui a 5 ans: René dit que Raoul le fera mourir de chagrin, ce qui effraie beaucoup Bellotte qui pleure et qui me dit: « Ah !Que deviendrai-je si papa vient à mourir. Je n’aurai plus personne pour me coucher. Je m’assierai là sur un fauteuil et j’attendrai ». Et elle sanglotte en disant cela.

Raoul est envoyé 3 jours au collège de Juilly pour le punir.

Visite des catacombes à Paris.

Le Dr Rancurel vient vacciner le bébé.

Rentrée au collège de Juilly pour Raoul et Bertrand : départ à la gare Raincy-Pavillons.
Puis train à Sevran.

Nous allons à pied jusqu’à Sevran pour rejoindre Juilly.
J’ai trouvé mon pauvre doux enfant bien triste, il ne peut se faire à la vie de collège, il pleure beaucoup, il ne mange pas.

Bellotte a peur que le diable ne l’emporte et dans son lit le soir elle appelait son père pour qu’il l’asperge d’eau bénite afin que le diable ne vienne pas la chercher !!!

1898

Nous faisons goûter nos chéris dans une vacherie de la rue du bac et Bellotte aime beaucoup sa tasse de lait chaud et son croissant. (elle a 6 ans)

Elle va à un enterrement protestant : « Le Protestantisme me paraît être une religion de glace sans élan, sans âme. »

Hélène a des coliques hépatiques. Le Dr Rancurel lui fait des piqûres de morphine dans l’estomac.

Troisième piqûre de morphine + 2 gouttes dans eau sucrée. Cela lui occasionne des hallucinations très curieuses. « Dès que je ferme les yeux, je vois mille choses extraordinaires, des têtes fantastiques, des ballets, etc. »

Bellotte veut quitter sa mère pour devenir servante chez Mme Pinondel mère !

Bellotte n’ira pas à l’école des Sœurs parce qu’elle est trop loin des Confins.

On va chercher de l’eau à la fontaine municipale.

En 1898, aux Confins, on a fait 408 pots de confiture.

1902

Je m’ennuie presque autant ici, à Paris, qu’à Villemomble où j’avais souvent la visite de Mme Pinondel qui me manque beaucoup.

Elle graisse les cheveux de Bellotte pour les empêcher de tomber (avec de l’huile de ricin).

« Je suis accablée de toutes les façons puisque en outre de ma pauvreté je ne suis qu’une pauvre infirme incapable de marcher seule. »

1906
Extrait fiche matricule 65101
29/10/1906

Bertrand est classé dans les services auxiliaires. Incorporé au 3e Régiment du Génie.

1907
Extrait fiche matricule 65101
09/07/1907

Bertrand est reformé par une commission spéciale du camp de Châlons, pour tuberculose pulmonaire.

1908

« À Villefranche le Père Paulin nous prêche sur les péchés mortels, la justice et la colère de Dieu. Il nous parle trop peu de sa bonté. »

Retour à Paris, changement à Marseille où ils passent la nuit, puis une nuit de train de Marseille à Paris. Ils ont passé 6 mois à Villefranche.

Première Communion de René à St Thomas d’Aquin. Il y a 175 Communiants.

Bertrand est un heureux garçon qui prend la vie du bon côté.

Visite du diplodocus au Jardin des Plantes.

Bertrand a tout à fait envie de se mettre au dessin. Il espère trouver sa voie dans la réparation des tableaux.

Bertrand suit les cours à l’académie Julian (25 frs par mois).

Nous allons à Montfermeil voir les de Ségovia.

Nous allons à Meaux par le chemin de fer, les enfants à bicyclette .
Nous avons parcouru la ville dans tous les sens et admiré ses moulins et magasins De farine sur l’eau, ses vieux moulins sur pilotis sur la Marne, puis la cathédrale… Déjeuner à l’hôtel St Rémi pour 2 frs par personne.

Nos voisins Scheaffer ont acheté une automobile. Ils sont en train de démolir leur jardin pour y construire une écurie pour la mettre dedans, or comme emplacement ils ont choisi le côté que nous avions vendu aux Vendorpe sous condition qu’on ne bâtirait rien de ce côté à moins de 3 m … René est allé les voir… pour leur demander…

En Octobre, il est question, sur les conseils du Père Havret de mettre Néné (René) au collège à Evreux, mais sa mère veut le garder car il est « son rayon de soleil ». Collège St François de Salles 500 frs de pension + 300 frs de frais.

Départ pour Evreux par le train.
René, le mari, souffre d’une congestion pulmonaire.

Hélène se plaint de Bellotte « apathique, dédaigneuse et indifférente… » (elle a 17 ans).

1912

De Villefranche-sur-mer, nous allons à Nice. Petit tremblement de terre dans la nuit.

« Tous les journaux sont pleins de détails navrants du naufrage du TITANIC survenu dans la nuit du 14 au 15 Avril dans les mers du Nord de l’Amérique. Naufrage causé par la rencontre d’une banquise dont les glaces coupantes ont déchirées les flancs du navire. Il y a plus de 1600 victimes dont des milliardaires qui n’ont pas pu se sauver parce qu’il n’y avait pas assez d’embarcations de sauvetage et qu’on a d’abord sauvé les femmes et les enfants. Ce grand paquebot coûtait des millions, était d’une richesse inouie. Il a lutté des heures avant de s’enfoncer à 3000 m dans la mer glaciale. »

Retour de Villefranche. Arrêt à Lyon deux jours . Arrivée à Paris le 16 Mai.

Le salon de Raoul est éclairé au gaz…

Retour aux Confins (à cette époque ils habitent rue Mayet)

Distribution des prix de Néné à Evreux.

Néné va en Angleterre par le Havre. Bertrand l’accompagne.

Mr le Curé de Villemomble quête pour son clocher. J’ai donné 20 frs.

Les chemins de fer payent 7599 frs les 303 m de terrain pris sur la parcelle des Confins.

Ce serait justice que plus tard les Confins soient à Bertrand. Il s’en occupe tant !

Bertrand porte un paquet de fruits à notre bonne Mme Pinondel qui le gratifiera comme toujours d’un bon verre de petit vin blanc qui lui fera voir tout en rose… Nous allons voir le nouveau pont des Coquetiers.

Néné va au salon d’automne où il y a exposition de tableaux cubistes
« Des paysages et des personnages faits en cubes . On ne sait au juste ce qu’on voit dans ces tableaux ».

Néné repart au collège à Evreux. Il ne reviendra qu’en Mai.

Départ pour Villefranche par le train de nuit. Escale à Marseille à l’hôtel Terminus.
Reprise d’un train le lendemain, arrivée à Villefranche à midi, accueillis par leurs amis.
1913
Ils sont à Villefranche dans un appartement de l’ancienne gendarmerie.

Bertrand est présent, ainsi que Bellotte qui apprend à danser le Boston. Néné est resté à Paris ou plus exactement au collège à Evreux.

Nous allons tous les trois à la grand-messe qui est chantée par les jeunes filles du pays et par conséquent le contraire d’une symphonie. C’est une cacophonie à enrager les chiens.

Bob a été insupportable aujourd’hui. On l’a fait sortir ce matin comme d’habitude et il est resté plus d’une heure dehors à jouer avec des sales chiens. Il devient vicieux. Aussi nous devons le corriger.

 

(Note de Daniel, petit-fils qui retranscrit ces écrits :  « Même leur chien ne doit pas fréquenter n’importe qui ! ! »)

Pour éviter les mites et autres insectes on utilise la naphtaline, le poivre et le pétrole.

Retour à Paris en gardant l’appartement de Villefranche pour la prochaine saison.
Nuit dans un hôtel à Nice. Je refuse de monter dans l’ascenseur. Je n’aime pas du tout ce mode de transport.
Ensuite nous allons à Sète (écrit Cette), puis Nîmes, Toulouse, avec une nuit dans chaque ville. Puis Lourdes.

Passage à Pau et visite du château, puis Bordeaux (nuit à l’hôtel et visite en voiture à cheval.
Arrivée à Paris le ai au soir à la gare du Quai d’Orsay où Bertrand nous attend.

Néné arrive pour 4 jours à Paris.

J’ai un peu sermoné et grondé Bertrand qui s’endort dans son marasme. Ce n’est pas raisonnable qu’il n’aille plus peindre au Louvre, qu’il vive ici sans jamais bouger ni parler à personne. Il vit comme un chartreux sans désir ni ambition. Il cherche sur des cartes postales des sujets de petits tableaux mais cela ne suffit pas, il faut travailler plus énergiquement.

Néné se prépare à passer son baccalauréat.

Bellotte a aujourd’hui ses 22 ans. Que Dieu la bénisse !

J’ai voulu mettre en ordre les vêtements des garçons… C’est désolant comme les mites abiment les vestes de ces pauvres garçons. Ils devraient se marier pour avoir une femme vigilante qui veille sur leurs affaires.

 

(Réflexion du Petit-fils Daniel : Mariez-vous pour éviter les mites !!)

Bertrand passe un grand examen de dessin pour devenir professeur de la Ville de Paris.

Néné a aujourd’hui 17 ans… et le voilà déjà arrivé au moment de son baccalauréat.

Nous avons été, René et moi, en tramway à Auteuil. Nous avons parcouru le champ de courses où en ce moment paissent un grand troupeau de vaches.

Bertrand a échoué au concours des professeurs.

(Ils viennent d’arriver à Villemomble pour l’été.)

René demande au Dr Rancurel de venir me voir demain. Depuis quelques jours j’ai un ronflement dans la poitrine qui me gène… J’ai souvent les jambes enflées le soir… J’aimerais mieux ne pas connaître mon mal… à quoi bon me soigner !

Bellotte et Raoul ont été cette après-midi à une kermesse donnée à la pension des jeunes filles de Villemomble donnée au profit du clocher.

(Daniel : Hélène ne peut accepter que ses enfants s’éloignent d’elle pour réaliser leur avenir)

Ah ! égoïsme des enfants qui ne pensent guère à leurs vieux parents. Nous aurons tout fait pour celui-ci (Bertrand) et il ne comprendra jamais ce qu’il devrait nous rendre par dévouement…

(Bertrand parle d’aller vivre au Maroc)

Néné arrive du Collège d’Evreux pour les vacances.

Retour à Paris pour que Néné puisse passer son baccalauréat à la Sorbonne le 21. Néné va dans la matinée voir un professeur de la Sorbonne… qui va lui faire passer demain un examen préparatoire.

Premier jour d’examen de Néné. Nous sommes dans une fièvre inexprimable. Version et devoir de français. Demain ce sera les sciences.

Deuxième jour d’examen ! Néné n’est pas très content de son examen de mathématiques.

Néné prépare son oral.

Il est admissible à l’écrit mais échoue à l’oral : Il est tombé sur de mauvais examinateurs qui n’ont vu en lui qu’un élève d’une école libre, bon à pressurer.

Séjour en vacances à St Valéry-en-Caux avec Raoul et Néné. Raoul joue du violon au casino.

Le 9 Août nous avons dû faire plus d’un kilomètre en pleine campagne, nous avons rencontré des chevaux et des vaches qui m’ont fait très peur !

Excursion à Fécamp par le train. Au port il y avait des bateaux arrivant de Terre-Neuve qui déchargeaient des milliers de morues, c’était très curieux et interressant à voir.

Nous allons conduire Néné à Dieppe pour qu’il prenne ce soir le bateau pour Londres. (Séjour chez Mistress Cooke).

Retour de Néné d’Angleterre. Il a une mine superbe, très engraissé, très entrain.

Néné travaille avec courage dans sa chambre. Il a fait du latin ce matin avec son père et il s’étonne de trouver en lui un bon latiniste. Il dit que son père est aussi fort que son professeur du collège. Visite de Mme Pinondel avec ses sœurs en voiture… Elle est toujours gaie et avenante aussi ai-je toujours grand plaisir à la revoir.

Nous avons acheté 2 mètres de machefer que Bertrand a étendu sur nos trottoirs.

Néné retourne au collège à Evreux pour préparer son examen d’octobre.

Visite de Nadine (Donnat) avec son mari Henri Bourgoin qui nous a paru très gentil et affectueux avec sa femme qui l’appelle « Chéri « et qui paraît très heureuse d’être mariée.

Néné passe à la Sorbonne son oral du baccalauréat. Il est reçu et donc bachelier de rhétorique. Il reste donc avec nous pour la Toussaint.

Avec ce fameux métro on perd l’habitude de voir les quartiers éloignés … qu’on traverse sous terre.

Paris est bien dangereux… à cause de la grande circulation des voitures et des autobus. C’est vraiment terrifiant quand on doit traverser certaines rues.

Jour de notre départ pour Villefranche. Nuit d’étape à Marseille. René est malade dans la nuit. Douleur au côté et fièvre.

René souffre au côté et le médecin dit que cette douleur provient du cœur.

Ah ! Quelle douleur, quel affreux malheur ! …Mon pauvre chéri avait bien dîné et s’était bien couché…à minuit, il se met à tousser très fort. Je m’éveille et lui dis : « Tu ne dors pas, as-tu mal quelque part ? Oui, répond-il, j’ai mal au côté. Quelle heure est-il » ? Vite, je craque une allumette, j’allume la bougie et je cours le rejoindre dans sa chambre. Je le trouve assis sur la chaise devant son lit tout couvert de sueur. Vite je le fais remonter dans son lit. Il tousse, crache continuellement et me dit d’une voix angoissée qu’il souffre beaucoup, qu’il na jamais eu ce qu’il a. En effet je ne l’ai jamais vu aussi malade. Sa poitrine fait un bruit comme un soufflet de forge. Il tousse et crache comme si quelque chose l’étranglait. Il dit: J’étouffe, j’étouffe, de l’air, je suis perdu, je n’en revendrai pasPardon mon Dieu ! Eperdue, je réveille Bellotte qui court chercher Mr Cormier, puis ils vont ensemble chercher le Docteur qui tarde …Il se meurt. Il est mort… Il est 2 h du matin.

Nos 3 fils arrivent avec leur oncle Guillaume. La mise en bière a lieu ce soir à 8h.

C’est aujourd’hui l’enterrement. Le ciel tout bleu nous parle de l’éternité…. Nous allons après la messe chantée très pieusement le conduire jusqu’au cimetière où la famille Montolivo me prête très aimablement une case de leur caveau.

Néné va repartir après le Jour de l’An avec Raoul qui s’occupera de l’achat d’un terrain au cimetière de Vaugirard où est enterré Mr Gatty.

1914
Dans l’hiver 1914 et au printemps Bellotte tousse beaucoup.

Dans la nuit : Bellotte et moi, vers 5 h du matin des bruits extraordinaires.

C’était comme des crépitements sur la table, sur le chemin ou sur le balcon… J’ai pensé que cela Pouvait être l’âme de mon bon René qui se réclamait à nous. J’ai prié tout bas et Bellotte en son particulier à son père : « Papa, si c’est toi, refais-nous encore ce petit bruit-là. Si tu as besoin de prières nous en dirons, mais fais-nous savoir si ce bruit vient de toi, et elle croit avoir encore entendu ce crépitement 3 fois mais chaque coup très éloigné l’un de l’autre.

J’ai passé la fin de ma nuit à prier pour lui.

Elle envoie 1000 frs à Raoul à Paris pour l’achat d’un terrain au cimetière.

Transfert du corps de René par Borniol de Villefranche à Paris par chemin de fer.

Arrivée du corps de René à Paris à 10h du matin.

Inhumation au cimetière Vaugirard : le caveau est bien fait, mais si creux, c’est un vrai puit.

Journée aux Confins. Il neige.

Première visite au cimetière de Vaugirard, humide et froid.

Visite au cimetière de Montparnasse, sur la tombe des parents de René. Nous n’avons pas trouvé le tombeau des de Bure, où il n’y avait qu’un corps.

Départ à Villemomble pour les vacances de Pâques avec Néné et Bellotte.

J’ai fait un rêve délicieux ! J’ai revu mon bon René et je me figure que c’est presque une vision de l’au-delà ! Ce n’était pas un rêve banal où la vie continue comme avant sa mort, non, j’avais la sensation bien nette qu’il m’avait quitté et que je le revoyais soudain et il me semblait que je me réveillais et que je le sentais dans mes bras. J’étais couchée et lui, assis dans le lit à côté de moi. Je serrais son corps de toute la force de mes bras et je lui disais : Comment, c’est toi, tu es revenu, O mon chéri ; mon amour ! C’est toi ! C’est toi !

Hélène reparle de ses petits agendas de 1906 et 1907, l’année terrible de sa maladie.

Bellotte me tourmente beaucoup car depuis notre retour à Paris elle ne cesse de tousser, elle a mauvaise mine et mange à peine.

Bellotte manifeste son désir d’indépendance.

Le Père Delfortrie m’a blessée sans le vouloir. Il me demande ce que je vais faire de Bellotte, si je ne vais pas songer à lui faire tirer partie de son talent en piano, elle s’est assez dévouée à ses parents et il est temps qu’elle songe à elle.

Convocation de la mairie qui veut créer la rue Gambetta. L’adresse est alors 8, allée Duportal.

Nous allons payer la feuille permettant à Néné de passer son examen de philosophie. C’est 90 francs. Ce bureau de la Sorbonne se trouve dans une vieille maison du quai St Augustin. On y fait queue tant il y a des étudiants voulant passer leurs examens.

Visite à la Mairie de Villemomble pour reparler des travaux de la rue.

Hélène repense à ses amies de jeunesse en 1896-97-98 

Je n’ai jamais été heureuse, ni joui de la vie. J’ai eu trop de misère. »

Bertrand me considère comme un obstacle à la réussite de ses affaires.

L’orage d’hier a causé d’affreux dégats dans Paris. Des égouts ont crevé et la chaussée minée par les eaux s’est effondrée en plusieurs endroits , entre autre place de l’opéra, sur la place St Philippe du Roule, sur la place St Augustin un taxi a disparu dans un trou, le chauffeur et sa voyageuse ont été noyés. On ne sait pas encore le nombre des victimes, mais on craint qu’il n’y en ait une dizaine car le sol se dérobait sous les pieds des curieux.

L’ouvrier qui grave l’inscription au cimetière allait mettre un « E » à « Villefranche -sur-MèrE ». Mon pauvre René en aurait frémi dans sa tombe.

Néné a réussi son examen à la Sorbonne, écrit et oral. Il est bachelier en rhétorique et en philosophie. Il vient d’avoir 18 ans le 4 Juin.

Les nouvelles politiques sont excessivement graves. Il paraît que la guerre est déclarée entre l’Autriche et la Serbie. Ce sera bientôt un conflit général. La France, amie et alliée de la Russie se prépare à entrer en guerre pour soutenir et aider la Russie. Mais en attendant la panique est en France. Tous les bureaux de caisse d’épargne sont assiégés par la foule des gens qui viennent chercher leur argent. Néné dit qu’il s’engagera…Bellotte dit qu’elle va me conduire dans le Nord pour avoir sa liberté et s’en aller avec la Croix Rouge soigner les blessés.

On parle de la guerre européenne. La France va mobiliser son armée.

LA GUERRE EST DECLARÉE… On mobilise.

Hier soir, un fou a ASSASSINÉ JAURES dans un restaurant de la rue Montmartre…
Jaurès était l’espoir de la paix et de l’antimilitarisme.

Ah ! Maudite Allemagne. Puisse-t-elle être écrasée par l’Europe entière qui va s’allier à nous pour réduire son orgueil ! Les trains passent toutes les 5 minutes bondés de soldats . On leur crie : « Vive la France ! A Berlin ! »

Raoul a gardé le pont des Coquetiers de 8h à minuit, Néné sa place de 4h à 8h. … Il paraît que nous sommes entourés d’espions allemands.

Réquisition des chevaux du pays.

Mes enfants sont réformés, mais ils ne sont pas contents, cela les humilie beaucoup de ne pouvoir servir la patrie.

« Ah ! Mon René, tu ne viendras donc jamais me dire là où tu es, que tu ne souffres plus et que tu es heureux »

On dit que les nouvelles de la guerre ne sont pas brillantes. On dit qu’en Lorraine les français ont reculé un peu… Si les Allemands venaient de nos côtés je pense que j’en mourrai de frayeur, ce sont de tels monstres.

Néné veut que je signe une autorisation pour qu’il s’engage. Je n’y suis pas du tout disposée.

La foule patriote vient au pont des Coquetiers pour voir passer les trains de blessés qui ralentissent et on leur donne des bouteilles de vin, des pots de limonade, des fruits.

Les allemands avancent terriblement.

Hier un aéroplane allemand a volé au-dessus de Paris et a lancé des bombes.

On dit que les Allemands sont à Meaux.

Le canon a grondé toute la journée, le pays est plein de soldats.

L’ennemi s’éloigne de Paris.

Bertrand a aujourd’hui 29 ans.

On se bat beaucoup du côté de Reims. Après la bataille de la Marne, c’est maintenant la bataille de l’Aisne qui paraît plus difficile à gagner. L’ennemi s’est renforcé par des travaux de fortifications importants..

Nous apprenons aujourd’hui que la cathédrale de Reims est en flammes…

Le pharmacien a donné à Raoul un cachet d’aspirine qui lui a fait grand bien aux dents.

Gertrude (allemande) vient demander l’hospitalité… Espérons que ce n’est pas une espionne. Nous la gardons quelques jours.

MORT d’HENRI BOURGOIN (époux de Nadine Donnat) au combat. Pauvre Nadine ! Veuve après moins de 4 ans de mariage.

Le général allemand Stenger défend à ses soldats de faire des prisonniers et dit qu’il faut achever les blessés, qu’il faut exterminer la race française.

Henri Bourgoin a dû mourir d’un éclat d’obus à la tête. Je vais faire dire 5 messes pour lui par notre petit cousin Félix Tibeauts, prêtre.

Les Allemands sont à Lille.

Gertrude s’en va… en bons termes avec nous. (Gertrude avait élevée Madeleine de Champeaux)

Le Grand Palais est converti en hopital militaire.

Néné s’incrit à l’école de Droit 32,50

Henri Bourgoin a été enterré à Martinicourt.

Conseil de révision pour Bertrand. Il est trouvé bon pour le service armé.

Néné entre ce matin pour la première fois à la chancellerie de la Légion d’Honneur. Il va y gagner 150 frs par mois.

Nous nous occupons ce matin des envois de douceurs pour le Noël des soldats.

Les Allemands envahissent nos bonnes villes de Roubaix et Tourcoing.

Raoul passe ce matin son Conseil de Révision et, merci mon Dieu, on ne le prend pas pour le service actif comme son frère ! Mais on le met dans les auxiliaires.

1915

Bertrand est encore avec nous. Néné a reçu ce matin son appel pour le conseil de révision le 8 Janvier.

Bertrand a reçu son appel ce matin. Il doit partir le 19 pour Chaumont dans la Haute Marne.

Raoul est accepté à la Légion d’Honneur comme auxiliaire pour 150 frs par mois.

L’épouse d’Henri Barbry, Hélène arrive avec ses quatre entants aux Confins car les allemands occupent le Nord.

Louis de Ségovia vient coucher rue Mayet plusieurs nuits pour le décès d’une tante.

Pierre Génu vient d’être tué d’une balle dans la tête.

Madeleine de Champeaux (fille de Guillaume) fait une scène a Bellotte à cause de ses cours de médecin qu’elle prend pour secourir les blessés. Elle dit que ce n’est pas convenable pour une jeune fille.

Bertrand est déjà au front, il est tringlot et conduit des chevaux d’un point à un autre.

Des Zeppelins ont passe au-dessus de Paris et ont jeté des bombes à Vaugirard, à Batignoles. Tout Paris a été en révolution… Malheureusement les aviateurs étaient en vacances et n’ont pas fait une chasse suthisante a ces ennemis.

Néné a reçu ce matin sa feuille de route pour le 21. Il va à Montargis.

Finalement Néné est convoqué tout de suite Boulevard Brune dans un bureau militaire et là on lui a dit qu’il était reçu à son examen d’élève officier et qu’il devait partir aujourd’hui pour se faire équiper à Montargis… Pourquoi ne le laisse-t-on pas passer sa tête de Pâques en famille ! J’en suis malade de chagrin !

Néné quitte Montargis pour St-Cyr.

Convocation au Commissariat de police du 6e pour «éclairage et fenêtre éclairée ». C’est à cause de la soirée de Raoul avec son ancien professeur d’Anglais.

Finalement tout s’est bien passé au Commissariat. Il faut fermer les volets dès qu’arrive la nuit. C’est une mesure de prudence contre les Zeppelins.

 

Nous allons à la messe de 8h avec Raoul. Au retour nous avons une grande joie. Nous voyons un gentil et très jeune militaire qui s’avance vers nous et nous reconnaissons Néné. Ah ! Comme il a bonne mine, comme il est joli, frais et rose dans son uniforme bleu horizon !

Raoul est convoqué à la caserne de la Tour Maubourg. Il est pris pour le service armé.

Raoul a dormi sur une paillasse dure et mince sur le parquet d’une chambre où ils sont nombreux et bruyants … Vraiment on n’est pas humain à la caserne.

Avec Raoul et Néné qui est venu passer le dimanche avec nous, nous allons au cinéma…. On y voit des bateaux de guerre aux Dardannelles, agités par la tempête en pleine mer, et c’était curieux d’entendre les observations saugrenues de nos voisins qui certainement n’en avaient jamais vu en réalité et qui disaient : « Pourquoi les fait-on bouger comme cela ? »

Reçu lettre de Bertrand qui entre dans un bataillon pour aller au feu bientôt.

Il est a Divion dans le Pas-de-Calais.

Nouvelles pitoyables de Bertrand qui est dans les tranchées et c’est pour lui un véritable enfer.

Raoul est muté dans l’artillerie à Creil… Mais il revient de temps en temps à Paris rue Mayet.

Lettre de Bertrand qui a passé 4 nuits et 3 jours dans les tranchées… au nord d’Arras. Violents combats très meurtriers. Il y a de grosses pertes pour tous.

Nous envoyons de la poudre à Bertrand contre les poux des tranchées dont le pauvre garçon se plaint beaucoup. Ah ! Puisse-t-il la recevoir bien vite ! Raoul est à Bourges et vient à Paris le 5 Juillet. Il apporte une lettre de Bertrand et sur le dos de l’enveloppe écrit d’une main étrangère « légèrement blessé au bras droit. Suis évacué. »

Enfin j’ai appris que mon fils Bertrand est à Quimper à l’hôpital… Nous allons aller le voir. Il faut aller à la mairie pour obtenir demi tarif sur le prix du voyage comme mère et soeur de blessé.

Voyage pour Quimper dans un compartiment bourré de militaires. Nous n’avons pas pu dormir.

Arrivée à l’hôpital St Yves où le Major très bourru nous permet de voir notre cher blessé… Le pauvre enfant a le bras complètement traversé par un éclat d’obus qui l’a atteint aussi à la cuisse.

 

(Elles restent à Quimper jusqu’au 22)

La famille Barbry qui logeait aux Confins s’en va pour Paris rue d’Assas après 5 mois de presence.

Bertrand arrive jusqu’au 18 Août.

Edouard Toulemonde vient me demander de prendre chez moi son fils Joseph (12 ans) et de le mettre externe soit au collège Stanislas ou au lycée Buffon, car il est incorrigible et d’un mauvais exemple pour ses autres enfants. Cet enfant n’a pas de conscience. Il paraît qu’il a volé et son père l’a battu presque à le tuer !

Nous allons à la campagne avec notre petit pensionnaire. C’est un vrai gamin très léger, très inconscient qui ne peut se mettre dans la tête qu’il vient chez nous en pénitence.

Néné arrive. Il a échoué à son examen et n’est que sergent . Il vient pour 8 jours à Villemomble.

Raoul est piqué contre le choléra pour aller aux Dardanelles. Nous retournons donc le soir même à Paris rue Mayet pour le retrouver.

Raoul part pour les Dardanelles pour faire de la manutention.

(à cette époque notre grand-mère Hélène va louer les Confins à ses cousins Edouard Toulemonde, évacués du Nord, pour 100 frs par mois. Le fils Joseph est déjà avec elle et il est insupportable.)

 

Edouard va faire mettre le gaz aux Confins.

Le courrier de ce matin m’apporte une pénible nouvelle ; Mon pauvre petit Néné est parti au front hier matin. Il s’en va en Argonne du côté du Four-de-Paris… J’ai beaucoup pleuré toute la journée…

Nouvelles de Raoul, arrivé à Mudros. Il a eu une terrible tempête.

Nouvelle de Néné, il est du côté de Vaucouleurs.

Pose du gaz dans la maison. Cela rend la maison bien confortable.

Arrivée des Toulemonde aux Confins.

Le petit Joseph revient vivre rue Mayet.

Le gendre de mon amie Gabrielle est Commandant et revient du front. Il en a assez de la guerre. Il a vu des choses atroces. Il a vécu dans la tranchée… infectée de vermines et de rats et souris par millions. On devait les chasser de son visage comme des mouches car la nuit les rats courent sur les figures endormies des poilus.

Nous recevons à déjeuner Charles Facques et son beau-frère Félix Tibeauts qui est prêtre. Cette petite réunion de famille nous fait grand plaisir car nos invités sont charmants.

Le magasin du Bon Marché brûle. Tous les pompiers de Paris sont occupés à éteindre ce gran incendie et la rue est barrée pour les passants. Nous sommes terrifiées. (finalement l’Annexe seule a brûlée)

J’apprends que Raoul a la jaunisse.

1916

Cette horrible guerre qui n’en finit pas me désole… Je pense a mes pauvres garçons… à Raoul malade à Mondros… J’espère que Bertrand court moins de risques que les autres étant brancardier et infirmier en ce moment. Mais où est mon petit Néné ? Il m’a écrit le 29 Décembre qu’il est tous près d’aller dans les tranchées. Pour l’instant il apprend à monter à cheval.

L’enfant Joseph Toulemonde, fils de Edouard et Léonie, visitant les Invalides demande à Bellotte, devant le tombeau de Napoléon : « Il est mort à la guerre ? »

Cérémonie à l’église St Etienne du Mont Sermon du Père Coubé: « La guerre est une expiation voulue de Dieu…Pour punir les hommes Dieu avait le purgatoire, l’enfer; mais pour les nations, c’était la guerre ». Il a parlé de l’orgueil des Allemands, de leur Empereur qui s’appelait le fléau de Dieu. L’Empereur d’Allemagne a appelé l’un de ses fils Eitel qui veut dire Attila.

Le jeune Joseph est repris par ses parents.

Des Zeppelins ont lancé 16 bombes sur le quartier de Ménilmontant et il y a eu 25 morts et 50 blessés.

Bertrand arrive en permission du fond de la Lorraine (20h de route). Il est en bon état physique.

Raoul, soldat vient d’arriver à Toulon pour cause d’anémie. Il est à l’hôpital.

Reçu lettre de Néné qui vient de passer 4 jours à la tranchée de 1ère ligne. Il a eu bien froid, a été bien mouillé et privé de sommeil.

Grands combats du côté de Verdun avec 200.000 allemands.

Paul de Bure vient d’avoir la croix de guerre.

C’est épouvantable ce qui se passe à Verdun, c’est une véritable boucherie.. jamais aucun combat n’a égalé celui-là.

La guerre entre dans une phase nouvelle depuis ces combats de Verdun qui n’en finissent pas.

À Marseille, où il est en convalescence, Raoul travaille dans une usine d’huile comme ouvrier. Il est obligé de tremper ses mains et ses bras dans de la graisse solide comme du miel ou a porter des bidons d’huile de 25 litres, c’est trop lourd!

Correspondance avec la famille du Nord par carte officielle délivrée par la mairie. Texte de 25 mots.

Presque tous les jours arrive la nouvelle de la mort d’un proche à la guerre.

Enterrement du Général GALLIENI à Paris.

Les nouvelles de la guerre sont mauvaises. Le fort de Vaux est pris !

On parle de révolution.

La grande offensive est commencée du côté de la Somme. Les Anglais marchent bien, ils vont dans les tranchées allemandes, ils les asphyxient et font des prisonniers.

(Lettre codée de Néné) : « À Verdun rive droite avant 8 jours »

J’apprends par l’oncle Guillaume qui vient me voir que Bertrand a écrit à son oncle pour lui dire que mon NÉNÉ BIEN AIMÉ EST MORT.

Est-ce possible ! Est-ce croyable ! Mon Dieu, pourquoi m’avez-vous frappée de la sorte ?

Mon pauvre chéri a été cruellement blessé dans la nuit du 12 au 13, une jambe écharpée, un pied broyé. Que de souffrances !

Nous sommes réveillées cette nuit par l’arrivée de Bertrand. On sonne à minuit…
Il a vu la tombe à Dugny à l’ambulance.

Raoul arrive ce matin.

Les obsèques de Néné se feront à l’église St Thomas d’Aquin, où il a fait sa Première Communion.

Bertrand repart à la guerre et Raoul à Marseille le 26.

Bertrand a reçu une lettre du fossoyeur de Dugny qui lui dit que Néné chéri a été mis dans un cercueil. Il lui envoie sa photo.

Convocation à la mairie du 6e pour avertir de la mort de Néné. « On ne se dérange plus pour prévenir les familles ! »

« René de Champeaux, sergent, a été cité comme ayant été décoré de la médaille militaire et de la croix de guerre. Il est mort bravement pour la grande cause que nous défendons tous » écrit le sergent Charpentier.

« Nous assistons ce matin à la messe de notre pauvre petit René à 10 h à St Thomas d’Aquin… Il y avait 44 personnes dont le Père Havret, le Père Delefortrie. On avait mis des faiseaux de drapeaux des deux côtés de l’autel de la Ste Vierge ». Bertrand est présent. Prix de la messe 63 frs.

 

Lettre de Bertrand aux tranchées:

 

« Voici la Toussaint qui vient raviver encore…nos tristes souvenirs. C’est le temps où nos morts dans leurs tombeaux espèrent nos visites et nos fleurs car tous les jours nous les pleurons dans nos cœurs où nous leur avons dressé un autel. La tombe de Papa doit être bien fleurie ! L’autre tombe, mon souvenir attendri l’évoque au milieu de tant d’autres, bien alignées comme des lits dans un dortoir de pensionnat. Sans doute, on a fauché les blés qui les environnaient, et bien peu de fleurs cette année prêteront la grâce de leur sourire au champ où dort une armée.

 

Ma chère Maman, unissons-nous tous et tressons de nos prières et de nos bonnes intentions une couronne qui sera plus éclatante que les chrysanthèmes et d’une odeur plus suave et plus agréable au cœur de notre cher petit disparu ! »

(Elle reproche à son défunt mari de ne pas avoir protégé son fils )

 

Nous allons au cimetière dire à notre cher René que nous l’aimons toujours quoique il n’ait pas pu protéger notre petit chéri.

Raoul quitte Nice pour Créteil. Il ira ensuite à Boulogne-sur-Seine pour préparer son instruction comme conducteur d’automobile ou conducteur de camions de guerre.

Raoûl a revu à Nice Lily Montolivo et il en est devenu amoureux… et veut l’épouser.

Visite de Bertrand, maigri et fatigué.

1917

Bertrand repart à l’armée par la Gare de l’Est.

Raoul est à Boulogne pour apprendre à conduire des camions automobiles.

Il y a 6 mois que mon bien-aimé petit Néné est mort !

 

Son ami le sous-lieutenant Babault vient nous voir et nous dit que Néné a eu les jambes brisées et le ventre ouvert par un éclat d’obus. Il a eu ses vêtements déchirés, ses lunettes brisées dans ses yeux. Il a du avoir un œil crevé. Son camarade a vu couler son sang le long de sa joue.

(Hélène se plaint que les prix augmentent)

 

Au Bon Marché, une boîte de papier à lettre que j’achetais l’année dernière 3,25 coûte maintenant 4,95 et la vendeuse nous dit que le papier à lettre va encore augmenter… Le savon de Marseille coûte 4,50 les 5 livres. En 1913 on le payait 2,25.

Le Père Benier, aumônier militaire, vient nous voir et nous dit que Néné n’a pas eu les yeux crevés. Le sang sur les joues venait d’égratignures. Il fait – 9°C et il neige .

Bertrand écrit qu’il a -17°C dans son baraquement. Le pain est gelé. Le vin de la messe gèle.

Quel horrible froid ! Nous ne pouvons plus allumer de feu car nous n’avons plus de charbon… un vieux bonhomme vient nous scier 7 bûches .

Grâce à nos bûches nous réussissons à avoir 10°C dans la salle à manger où nous nous réunissons.

Enfin du charbon nous arrive des Dreux !

La vie devient de plus en plus difficile. On ne trouve plus à manger dans Paris. Tous les légumes sont gelés, la viande rare.

Raoul est dans l’Aisne. Il a été au front près de Reims. Il conduit des tracteurs conduisant des canons de marine.

Il fait moins froid, mais Bellotte a la grippe !

Lettre de Bertrand qui raconte toutes les souffrances qu’il a endurées dans les tranchées de Champagne : Enlisement dans la boue, enlisement dans sa sape un obus étant tombé sur les marches…

 

Ils ont été enterrés vivants pendant une nuit et un jour mais ont réussi à dégager l’entrée. Ils ont dû se préserver des gaz asphyxiants envoyés par des obus. Bertrand a eu des camarades qui sont devenus fous.

Il a souffert de la faim, de la soif du 11 au 19 Mars.

Ils vont aux Confins pour préparer et ensemencer le jardin.

La grande offensive a été un grand désastre pour nous. Le général Mangin qui en était l’instigateur a été cassé et envoyé à l’arrière car ce n’était qu’un incapable… Il a fait marcher ses hommes sans les encadrer par l’artillerie, et tous ont été tués ou blessés.

Un soldat vient nous bêcher 3 heures le jardin pour 2,10 frs.

Surprise ! Raoul arrive en permission.

Nous allons à la messe à Villemomble. Nous allons dire bonjour à Mr le curé. Le nom de Néné chéri a été écrit en lettres d’or sur des plaques de marbre dans l’église. Il n’est donc pas oublié dans ce petit pays où il est né..

6h du matin Bertrand arrive aussi en permission ! Mais Raoul doit partir à 9h. Tran est intarissable de détails sur sa triste vie à la tranchée et sur les dangers courus.

En revenant de la messe de Villemomble nous rencontrons Mr et Mme Temporal qui ignoraient la mort de Néné.

Bellotte a voulu que je me pèse chez le pharmacien. Je pèse 79 kg 500. En octobre je pesais 83,500. J’ai donc maigri de 4 kg. Je n’en suis pas fâchée car j’ai encore un poids respectable.

Bertrand nous arrive vers 10 h aux Confins, bien maigri. Il vient pour 8 jours. Il est déprimé et fatigué par cette vie de guerre. Ce qu’il nous raconte me glace de terreur pour l’avenir.

Mon cher permissionnaire est bien content de la bonne nuit qu’il a passé dans son lit, la première déshabillé et couché sur un matelas depuis 3 mois.

Bertrand nous dit qu’au milieu des combats il tremble à claquer des dents.

Bellotte va à la Poste pour téléphoner à son amie Marguerite… Cette invention du téléphone est merveilleuse. Après quelques minutes d’attente Bellotte est mise en communication avec son amie qui est à Paris.

C’est mon anniversaire. J’ai enfin 60 ans !

Nous allons après le repas nous asseoir au potager pour voir passer les trains. Tran a aujourd’hui 32 ans ! Ah ! Que Dieu me le rende ! Je pense bien à lui.

Je me mine dans mon chagrin, mais j’aime ma douleur et ne veux pas en guérir car j’ai la vie en haine.

Nous avons reçu ce matin une bonne lettre de notre cher Bertrand qui nous apprend qu’il a enfin obtenu une citation avec la croix de guerre.

Raoul quitte la Belgique…

Le Père de Witasse propose à Bellotte de s’occuper, à Paris, de 2 garçons de 9 et 6 ans les après-midi de 2 h à 7 h du soir pour les promener, s’en occuper, leur expliquer leurs devoirs…Je n’ai pas pu m’empêcher de lui montrer mon chagrin. Ainsi , elle me sacrifierait complètement. Je ne pourrais plus ni sortir avec elle, ni plus faire de visites… mieux vaut m’enterrer tout de suite. Le Père de Witasse n’a guère de jugement… Heureusement Bellotte a compris… que cela ne me plaisait pas… J’ai écrit au Père de Witasse ce que je pensais !

Bellotte m’en veut que je ne veux pas qu’elle donne des leçons tous les après-midi. Elle trouve ma société déprimante parce que je n’aime plus la vie et que je pleure toujours mon petit Néné.

Retour à Paris pour l’hiver.

Bertrand nous arrive en congé pour 14 jours.

Le docteur Ancelet prend la tension de ma circulation artérielle. Cela ne va pas du tout, j’ai 22, ce qui est très exagéré.

Bertrand est reparti et je me réveille très souffrante avec un violent mal de tête.

J’ai des éblouissement toute la matinée.

Nous assistons à deux messes… Voilà le 4e anniversaire de la mort de mon cher mari… J’espère ne plus craindre la mort si antipathique à notre nature terrestre. On l’appelle dans la tristesse, dans le deuil de ses morts et quand elle fait mine d’approcher on se rejette vivement en arrière et on veut vivre encore hélas ! Car l’inconnu fait peur.

Dans l’année 1917 j’ai fait 152 pots de confiture et 4 flacons de pêches et de poires.

1918

Paris couvert de neige.

Le médecin dit qu’Hélène a de l’hypertension artérielle causée par le mauvais temps.

Il fait – 8 °C à Paris.

C’est aujourd’hui que commence la CARTE DE PAIN. Chacun n’a droit qu’à 300 grs de pain par jour.

Pendant la nuit bombardement aérien de Paris: 4 escadrilles de 15 Gotha.

L’adresse postale des Confins est allée Duportal.

Les nouvelles de la guerre sont alarmantes. On dit que la grande offensive allemande est commencée depuis hier, on se bat furieusement du côté de Reims, d’Epernay, de Verdun, etc.

Nuit épouvantable. Troisième raid d’avions boches depuis le 31 Janvier et celui-ci surpasse en horreur tous les autres car les dégâts ont été pour notre quartier…

Explosion formidable. Une usine de munitions qui saute à La Courneuve.

Invitation à déjeuner chez les Pollet. Nous apportons notre pain.

Il y a de plus en plus d’alertes et de bombardements le jour et la nuit. Les allemands ont percé le front, ils ont repris Bapaume, Péronne, tout ce qu’on leur avait pris depuis 1916. Les troupes françaises vont au secours des anglais. C’est une vraie boucherie là-bas !

L’ennemi a franchi la Somme en certains points. Ils ont pris Nesle qui est à 10 km de Roye. On se bat avec une violence inouie sur les routes d’Amiens.

Une bombe est tombée sur St Gervais et a fait 70 morts et 90 blessés, un vendredi saint, à 3 heures de l’après-midi. Ce matin le bombardement recommence à 7h1/2. Le premier obus est tombé rue Falguière, rue de Babylone. La mort rôde autour de nous.

Raoul colle des papiers aux fenêtres.

Raid de Gothas à 3 h du matin.

Tout le monde quitte Paris en masse.

Nous partons pour Bernède par la Gare d’Orsay; arrivée à Montauban à 9h du matin. Correspondance pour Valence-d’Agen et Bemède, dans un vrai château à l’aspect seigneurial. La Garonne déborde.

 

( Ils sont chez leurs amis FAURE)

Bertrand a été BLESSÉ le 6 Juin au Mont de Kemmel (Mont Kemmel) d’un éclat d’obus au genou gauche. Il est à l’hôpital de Bourbourg-Nord.

Bertrand quitte Bourbourg pour St Brieuc : 45h de voyage. Il est guéri.

Bertrand vient a Bernède. Il dessine le château.

Retour à Paris par le train.

Jacques Donnat, qui travaille au bureau de la Légion d’Honneur propose une place à Bellotte. Sa mère ne veut pas.

Retour de Bertrand à la guerre, mais le médecin dit qu’il est indisponible, sa jambe n’est pas vraiment remise.

Heureusement que tout va bien à la guerre. Nos alliés et nos soldats balaient la vermine allemande hors de nos villes. Nous avons repris Roye, et les Anglais sont dans les faubours de Bapaume.

Gilbert, blessé, est dans un hôpital à Pontoise.

Visite aux Confins des Charles Pollet, Hermance, Thérésa.

Bertrand est retourné au front mais comme infirmier. Il est dans les voitures de l’arrière et soigne les blessés. Il dit que le canon fait rage.

Cambrai et St Quentin sont en flammes.

Les allemands se replient et se sauvent de partout. Mais ils tuent encore beaucoup des nôtres.

Anniversaire de mon mariage. Epidémie de grippe (N.B. grippe espagnole). On meurt en foule. Cela dégénère en pneumonie. À Pavillons il y a eu trois enterrements dans la semaine.

Lille est délivrée, Ostende et Douai aux mains des Anglais.

Louis de Ségovia, soldat, a été blessé aux yeux.

L’ARMISTICE A ÉTÉ SIGNÉ À 6H DU MATIN.

 

Les hostilités ont été suspendues à 11h. Aussi à cette heure solennelle le canon a tonné et on a sonné les cloches dans toute la France..

Nous allons Place de la Concorde où la joie, l’enthousiasme sont indescriptibles.

Mon Dieu, vous avez sauvé la France !

Toutes les rues sont pavoisées…

Nous allons à Villemomble par le tramway de Vincennes. Retour à Paris le soir.

Lettre de Raoul : Ma chère Maman, Noël ! Noël ! Comme disent les Américains !

Grande nouvelle ! La date du 11 Novembre restera à jamais gravée dans nos mémoires et sera une des plus grandes dates de l’histoire du monde. Le plus puissant et malfaisant adversaire que la terre ait porté, ce colosse gigantesque et terrible est broyé à nos pieds…. Espérons que ce sera la dernière guerre de long temps.

Aux Tuileries, manifestation Place de la Concorde en l’honneur de l’Alsace et de la Lorraine rendues à la France.

Paris est en fête pour la visite du roi d’Angleterre.

Mon cher Bertrand m’arrive ce matin à 9h ½. Quel bonheur de le revoir ! Congé de 22 jours… Bertrand a encore le genou raide et enflé.

Le roi d’Italie est à Paris.

Merci mon Dieu de m’avoir permis de voir la fin de la guerre !
Je voudrais, avant de mourir, assister au bonheur terrestre de mes trois enfants.
Que Dieu les bénisse comme je le fais de tout mon cœur !

1919

Bellotte va à la mairie chercher la carte de pain pour deux mois.

Je me suis remise à écrire la vie de Néné. J’écris ses lettres du collège quand il avait 12 ans et je les trouve toutes si bien tournées, si intéressantes que cela me poigne le cœur et me fait pleurer toutes mes larmes.

Raoul arrive en permission.

Bertrand écrit qu’il est à l’hôpital à Epinal. Il a dû avoir beaucoup de fièvre car le médecin-chef l’a fait mettre à l’hôpital avant que son régiment soit dissout.

Bertrand arrive en permission.

C’est triste de parcourir les halles car c’est la famine en France, et bientôt peut-être la révolution. Ah ! Nous n’avons pas une victoire ni gaie ni brillante ! Il faut malgré tout pleurer nos morts !

Raoul est démobilisé.

 

Bellotte a une glande au cou qui la fait souffrir. Elle est toute fiévreuse. Sa santé me tourmente.

Nous allons dour la première fois chez le Dr Allard pour les rayons X de Bellotte… Il lui découvre des ganglions dans son poumon gauche qui respire mal. On lui fait la photographie de son intérieur.

2e séance de rayonx X

3e séance de rayonx X.

On met des ventouses et des cataplasmes à Bellotte. Elle a touiours de la fièvre : 39 °

Un médecin appelé parle pour la première fois de tuberculose et ordonne de la suralimentation.

Bellotte souffre d’une violente douleur au côté.

Le Dr craint une pleurésie.

On lui fait prendre 2 pilules d’opium pour dormir. Cela l’a calmée.

Ponction d’eau au poumon droit.

L’autre poumon commence à se prendre.
Plusieurs médecins la visitent.

Phlébite au bras gauche.

Le Dr dit qu’elle n’est pas du tout sauvée… Qu’elle doit devenir tuberculeuse. C’est une suite inévitable de la pleurésie.

Mi-juin, il y a un mieux, Bellotte remange un peu.

SIGNATURE DE LA PAIX.

 

Les Allemands acceptent nos conditions.

Départ de Bellotte en voiture-ambulance pour le sanatorium de châtillon.

Désinfection de la chambre avec du formol. La santé de Bellotte s’améliore un peu. Puis redevient mauvaise en Août.

Du 20 Août au 3 Septembre 1919, Hélène va faire un séjour à Tourcoing chez sa sœur Maria. Bertrand est venu avec elle.
En Septembre, nouveau traitement pour Bellotte. Les rayons chauds doivent faire passer ses glandes. Elle se sent épuisée. Sa mère vient vivre auprès d’elle à Châtillon pendant 15 jours.

Jacques Donnat propose a Bertrand une place à la Légion d’Honneur à 300 frs par mois. Ce n’est pas une situation suffisante.

Je me méfie du caractère de Raoul, très bon garçon, mais si mai équilibré ! Raoul nous donnerait tout ce qu’il a, mais ne sacrifiera jamais ses goûts à sa sœur. Il aime la discussion et ne comprend pas que la discussion pourrait la tuer dans l’état de faiblesse où elle est actuellement.

Il y a un peu lutte entre les deux médecins : Artault qui dirige la maison de Châtillon et Piquet médecin de Paris. Le sanatorium n’est pas chauffé en octobre. Bellotte perd ses forces de jour en jour.

Bellotte dit qu’elle envisage la mort avec sérénité. Elle me dit qu’elle n’en a pas peur, mais que cela l’ennuie à cause de la perturbation que cela amènera dans notre vie…

Le Dr Artault est plein de suffisance et dit qu’elle n’est pas en danger.

Nous quittons Châtillon avec la voiture de Mme Boucard pour la rue Mayet. Bellotte est bien faible.

L’oncle Guillaume donne 1000 frs pour bien soigner Bellotte. Les nuits sont de plus en plus pénibles. Le Père Havret vient régulièrement apporter la Communion.

Hélas, me voilà arrivée au bout de mon calvaire et j’ai dû boire mon calice jusqu’à la lie car rien n’a pu arrêter l’inexorable mort !

C’est affreux… hier soir ma pauvre chérie ne me paraissait pas aller plus mal que la veille, sauf qu’elle urinait de moins en moins, mais la température baissait, et dans ma folie je m’imaginais que c’était un bon signe tandis qu’au contraire c’était très mauvais….

FÊTE DE L’IMMACULÉE CONCEPTION

 

C’est à 1h1/2 du matin que je lui ai donné mon dernier baiser en la mettant bien relevée sur ses oreillers. Elle avait la respiration embarrassée…J’étais très fatiguée… Je me suis endormie et je ne me suis réveillée qu’en entendant sonner 6 heures. Ah ! Quel épouvantable réveil ! Le feu était éteint. Elle semblait dormir. Après avoir touché le petit poële, je vais à son lit d’où je n’entends rien. Je la vois bien paisible dans la même position où je l’avais laissée à une heure et demie. Je lui prends le bras. Il était froid. Je le palpe jusqu’au coude : « Oh ! Ma chérie, tu as froid ! Souffres-tu ? Dis-moi ce que tu as ? »

 

Hélas, plus de réponse … Elle est morte.

Je bondis hors de la chambre en appelant mes deux fils : « Mes enfants, venez vite, votre petite sœur est morte…Elle est morte. » Ah ! Quel réveil pour tous les deux.

9 h : Enterrement à St François Xavier.

(Elle repose au cimetière de Vaugirard aux côtés de son père)

Ma pauvre chérie est morte de la tuberculose… Il faut désinfecter tout ce qu’elle a touché.

1920
Hélène, écrit le 1″ Janvier 1920 :

 

« J’hésite à commencer ce petit journal. À quoi bon maintenant que je n’ai plus ma Bellotte chérie. Que puis-je espérer de bon dans ma triste vie… Dieu me l’a prise après huit mois de grandes souffrances… Raoul est bien frêle, délicat…

La désinfection nous rapporte les matelas et tous les vêtements de ma pauvre. Bertrand est retourné à la Légion d’Honneur.

La SEINE DÉBORDE… On peut craindre une grande inondation comme en 1910.

Grêve des chemins de fer. On vit dans un terrible temps et rien n’est sûr car il y a des grèves partout.

Projet de mariage de Bertrand avec Marie Zobel. Bertrand refuse.

Projet de mariage de Raoul avec Solange Gauchery.

Raoul rêve d’acheter un appareil pour sa bicyclette qui la transformerait en motocyclette. Cela coûte 600 frs.

Raoul a joué du violon à une messe d’enterrement à St François Xavier pour 20 frs. Ce soir il joue dans un bal pour 100 frs.

L’Allemagne est en pleine révolution. Le Parti militaire a renversé la régime républicain.

Ils voudraient faire revenir leur Kaiser.

Grève générale à Paris, bagarres et des morts dans le quartier de la Bastille et la Gare de l’Est.

Guillaume m’a envoyé une caisse de thé superbe.

Nouvelle lessive faite avec un ingrédient, nommée « Persil ». Cela blanchit bien le linge.

Raoul pèse 61 kg ; Hélène (mère) 75,5 kg .

 

« Tout tourne en graisse chez moi ».

C’est aujourd’hui l’anniversaire de ma Première Communion en 1869. J’étais alors une petite fille timide, craintive.

Nous nous mettons en route pour notre grand voyage de DUGNY (près de Verdun).

Nous traversons la Champagne, Epernay, Chalons,etc. Nous arrivons à Verdun à midi. Nous allons déjeuner dans une œuvre pour les familles éprouvées…Nous visitons toute la ville.

Nuit dans une auberge à Dugny. Mr le curé nous a conduit au cimetière et un dit un « de

profondis » sur la tombe de notre cher petit martyr. Ce matin il a dit la messe pour lui.

 

Visite des champs de bataille en autocar.

Nous avons eu la visite de l’abbé Alfonsi, curé de Pavillons-sous-Bois. Il est bien aimable et me parle avec affection de mes 2 enfants morts et surtout de Bellotte pour qui il avait beaucoup d’estime.

 

(Hélène se lamente beaucoup de la vie chère)

Changement de Président de la République Mr MILLERAND remplace Paul DESCHANEL, devenu fou.

Grand jour de fête pour toute la France.

 

On fête le cinquantenaire de la République et l’anniversaire de l’armistice. Il y a aujourd’hui beaucoup de cérémonies touchantes car on veut glorifier les héros morts pour la patrie et on a amené à Paris UN POILU MORT INCONNU qu’on promène dans toute la Capitale. On va l’enterrer sous l’arc de triomphe de l’étoile, tandis qu’on promène le cœur de Gambetta pour le déposer plus tard au Panthéon.

 

Il y a aussi des cérémonies émotionnantes à Notre-Dame, et le Gouvernement s’y est fait représenté… La foule est grave et recueillie.

Raoul organise souvent des « concerts », notamment privés dans l’appartement de la rue Mayet à Paris.

La voici donc finie cette année 1920, qui s’est écoulée pour moi dans les larmes et dans les regrets.

J’ai fait 132 pots de confiture cette année.

1922
Hélène vit avec ses deux fils Raoul et Bertrand rue Mayet à Paris 6e. Raoul est violoniste, Bertrand est peintre et en même temps employé à la Grande Chancellerie de la Légion d’Honneur.

 

 

Le Docteur vient me faire une saignée parce que ma tension est trop forte.

Bertrand me soigne comme un ange.

Encore un épisode pour marier Raoul qui refuse.
L’éclairage de l’appartement de la rue Mayet se fait encore au pétrole.

Je demande au Dr Veillau s’il a un instrument pour prendre la tension artérielle. Il n’en a pas. Mais il prend le pouls, qu’il trouve assez vif.

Raoul va voir… Mme de la Vault qui… avait à lui parler de mariage. Or, il paraît que la jeune Madeleine Dubois qui le refusait l’année dernière voudrait revenir sur sa décision.

Bertrand emmène sa mère au cinéma de la rue d’Odessa voir un film américain très mouvementé et truqué.

Il est à nouveau question de Madeleine Dubois pour Raoul.

Nous sommes invités tous les trois à aller passer la soirée chez Mr Dubois, Bd St Germain…Nous trouvons une famille charmante. La jeune Madeleine est mignonne et paraît déjà très attachée à mon Raoul. Elle me plaît beaucoup. Mr Dubois est aussi très aimable.

Raoul est heureux et ne pense plus qu’à sa petite Madeleine.

Madeleine me paraît charmante et dévouée.

Hélène fait faire la bague de fiançailles en fournissant au bijoutier un diamant et des petits brillants.

Je vois Mme Chemin, sœur ainée de Madeleine Dubois.

Messe et repas de fiançailles au 213 Bd St Germain.

Raoul est allé faire des visites à l’oncle Guillaume et à tante Donnat seul avec Madeleine.

Autrefois une jeune fille ne serait jamais sortie seule avec son fiancé. Mais maintenant tout est bien changé!

Mr le curé de DUGNY me prévient que les exhumations doivent commencer le 20 Juin.

Elles doivent durer 10 jours à raison de 90 par jour. Le retour de mon bien-aimé petit René est donc imminente… Je veux absolument aller à Dugny !

L’exhumation de mon cher René se fera le 26 Juin.

Mariage à l’église Sainte-Clothilde à midi ¼: « Madeleine paraît toute heureuse »

Départ des mariés en voyage de noces à Quimper.

Départ d’Hélène et Bertrand pour DUGNY. Arrivée par le train vers midi à Verdun.

Nuit à Dugny. Après-midi au cimetière auprès de la tombe chérie. J’y ai dit mon Rosaire. Bertrand y a fait une aquarelle. Visite à Mme Bodeau, la châteleine du Prieuré où notre Néné est mort. Cette dame est bien aimable et surtout très pieuse.

EXHUMATION. Bertrand y assiste : « Il a revu les restes glorieux de son frère chéri, a vu ses blessures, une jambe cassée en deux endroits, son corps était à moitié couvert de son linge et de sa capote en lambeaux, ses bras croisés. À l’un de ses poignets il a repris sa médaille d’identité où l’on pouvait encore lire son nom « de CHAMPEAUX René, sergent au 169e».

 

Bertrand a retrouvé sa plaque à lui qu’il avait donné au fossoyeur en 1916 pour clouer sur son cercueil.

 

Retour à Verdun le jour-même

Nuit à l’hôtel de la Cloche d’Or, puis train pour Paris.

Hélène quitte la rue Mayet pour habiter aux Confins avec Bertrand et ainsi laisser l’appartement au ménage de Raoul.

Visite de Raoul et sa femme aux Confins. « Raoul est rayonnant de bonheur ».
Le jeune ménage a passé la nuit ici.

Nous recevons ce matin un avis que le corps de notre cher petit René est arrivé à Paris et qu’on l’a mis au dépôt des pompes funèbres rue Aubervilliers.

Bertrand m’emmène peindre l’abbaye de Livry. Il a fait un joli tableau à l’huile. Pauvre abbaye dévastée. Malgré ses ruines le parc avec ses étangs est toujours une merveille.

On vient du gaz ouvrir le compteur.

Notre gaz, installé mardi, nous éclaire magnifiquement.

Raoul apprend à sa femme à aller à bicyclette : « Il court auprès d’elle pour la préserver d’une chute ». Ceci à Villemomble.

Bertrand va voir Mme Delahousse.

Bertrand a aujourd’hui 37 ans.

Je reçois aujourd’hui une longue visite de Mme Delahousse qui vient de perdre son fils ainé presque subitement d’une congestion cérébrale. Elle me raconte cela bien tristement. Je la console de mon mieux… Elle admire beaucoup mon beau jardin.

Raoul a loué une chambre à l’hôtel avec Madeleine et Hélène revient avec Bertrand dans l’appartement de la rue Mayet.

Je vais avec Bertrand entendre au Trocadéro « Le Messie » de Haendel. Raoul y joue.

Départ pour BAR par le train P.L.M. Arrivée à Marseille à 10 h du soir. Un jour et 2 nuits à Marseille puis le train pour Grasse, puis auto pour Bar… Ce pays ressemble beaucoup à Èze.

1924

Raoul veut abandonner la musique et rentrer dans un bureau d’assurances où on lui promet 400 frs par mois.

Les Confins. Je veux qu’ils soient donnés à Bertrand en récompense pour son dévouement pour moi… Raoul aura pour sa part le 27 rue Mayet. Les fruits du potager seront pour tous les deux.

Nous ne désirons pas l’électricité au 27 rue Mayet.

Bertrand est allé porter 4 aquarelles à une exposition des blessés de guerre aux Invalides. On lui a offert 75 frs pour 9 aquarelles en plus des 4 autres encadrées.

Bertrand vend dans la matinée pour 36 frs d’aquarelles à la foire aux croutes à Montmartre. IL est très content.

Je remercie le ciel qui m’a donné un bon Bertrand, un ange consolateur qui veille tant sur sa pauvre mère si infirme.

Madeleine a eu ce matin à 4 heures UNE BELLE PETITE FILLE qu’on va nommer MONIQUE , Claire, Hélène. La mère et l’enfant vont bien. Naissance à la clinique rue Violet.

Nous allons voir le cher bébé qui est une miniature d’enfant 6 livres70.

Nous allons chez les Chaumien entendre un concert par la télégraphie sans fil de la tour Eiffel. C’est très curieux… Voilà un plaisir qu’on ne connaissait pas autrefois, entendre chez soi des concerts !

Raoul et Madeleine partent avec Monique chez les de Ségovia en Charente.

Bertrand me conduit dans ma voiture d’infirme à l’église de Villemomble.

Il est question d’installer l’eau de la ville l’année prochaine.
Hélène est de plus en plus infirme. Elle ne peut plus descendre seule l’escalier des Confins.
1926

Bertrand m’emmène au cinéma voir le 1er chapître des Misérables de Victor Hugo.

Bertrand a vendu pour 1425 frs de tableaux à la foire aux croutes Bd St Germain. Il a vendu 62 œuvres.

Je souffre cruellement et ne peux marcher. Quand je me lève de mon fauteuil, je dois rester immobile pendant dix minutes et même davantage tant ma jambe droite me refuse ses services.

Le Docteur me fait 50 pointes de feu. C’est horriblement douloureux ! Il le fait sur le nerf sciatique.

Visite de Monique qui marche seule.

J’ai des troubles dans les yeux. Je n’y vois plus rien…

Bertrand a reçu une lettre qui lui parle d’un parti, elle le convoque à une entrevue… Cela me bouleverse et j’en pleure.

Le Dr Kollitsh, fils, se figure que mes douleurs sciatiques sont occasionnées par une tumeur, un fibrome, que j’aurais dans le ventre… et qui appuierait sur le nerf sciatique.

Il voudrait me visiter mais je refuse énergiquement. Ce n’est pas à mon âge qu’on se laisse visiter par des jeunes blancs becs comme lui.

 

En Mars plusieurs partis seront présentés à Bertrand.
Aucun ne lui convient vraiment.
Ce journal s’arrête le Mardi 13 Avril 1926 et Hélène de CHAMPEAUX, née CAULLIEZ meurt le 26 Avril 1926 à l’âge de 69 ans.
Elle est inhumée au cimetière de Vaugirard où se trouvent déjà les restes de son mari René et de ses enfants René et Hélène.

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